Le souffle de la chair

La vie change quand on découvre son corps. Elle change encore plus quand ce corps se met à avoir une âme. On découvre alors une vie étonnante. Celle qui vit en nous et qui ne demande qu’à vivre. Spinoza l’appelle la vérité en disant d’elle qu’elle est index sui : elle parle d’elle-même. Le vrai amour en est l’exemple. Il parle de lui-même parce qu’il est vécu corps et âme. Rimbaud a passionnément recherché cette vérité comme le montre la fin d’Une saison en enfer où il s’exclame : « Je veux posséder la vérité dans une âme et dans un corps ». Cette vérité apparaît quand on vit corps et âme. Merleau-Ponty l’appelle la chair. Elle est notre noyau d’être et à travers lui le vécu profond que la phénoménologie recherche comme étant la clef de ce qui est. Proust en fait l’expérience : quand il vit à la surface de lui-même, traînant son corps et son ennui de salon en salon, il n’arrive pas à écrire. Quand il laisse vivre les sensations profondes qui vivent en lui, il est saisi. (…) En sentant vivre la matière et le corps, en se sentant vivant, Proust découvre la matière spirituelle qui est le corps de son corps. (….) On le découvre en passant du corps que l’on a ou corporéité au corps que l’on est ou corporalité. En faisant corps avec la vie que l’on a pour devenir la vie que l’on est, on prend corps avant d’avoir du corps comme un vin accompli. » Bertrand Vergely

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